Le ratio d'équité au menu des prochains rapports

Actualité WAAGE PRO, Publiée le 09 octobre 2019

Sur le gouvernement d'entreprise

C'était une promesse de campagne du candidat Macron… « Nous ferons publier par les grandes entreprises un ratio d'équité mesurant l'écart de rémunération entre le dirigeant et les salariés », assurait-il dans son programme pour les entreprises. Voilà qui est fait, puisque l'article 187 de la loi Pacte, qui vient modifier l'article L. 225-37-3 du Code de commerce, rend obligatoire la communication sur « le ratio entre la rémunération de chaque dirigeant et la rémunération moyenne et médiane des salariés à temps plein ». Seules concernées, les sociétés cotées sont donc désormais tenues de préciser, dans le rapport annuel sur le gouvernement d'entreprise, à combien de salaires moyens correspond la rémunération du président du conseil d'administration, du directeur général et de chaque directeur général délégué.

 

Impact en termes d'image

Aux Etats-Unis, où la publication du ratio d'équité a été rendue obligatoire l'année dernière, en écho à la loi Dodd-Frank, il n'est pas rare que la rémunération du dirigeant représente plus de 300 fois la paie d'un salarié moyen. Dans les entreprises françaises, l'écart serait bien moindre, néanmoins cette nouvelle obligation pourrait avoir des impacts sur l'image des organisations. « Le nouveau cadre législatif impose seulement de communiquer, il ne limite en aucune manière le montant de la rémunération du dirigeant. Mais si le salaire du PDG est cinquante ou cent fois supérieur à celui du salaire moyen, l'entreprise sera contrainte de justifier cet écart. Sinon, elle risquerait de subir un phénomène de 'name and shame' écornant sa réputation », pointe Bruno Dondero, avocat spécialisé en droit des sociétés, associé chez CMS Francis Lefebvre Avocats et professeur à l'Ecole de droit de la Sorbonne.

 

« Des foules de calculs »

La mesure du ratio d'équité s'appliquant aux exercices comptables postérieurs à la publication de la loi Pacte (qui a eu lieu le 23 mai 2019), c'est à partir du printemps prochain que le sujet fera son apparition dans les rapports des entreprises. « Il est toutefois préférable d'anticiper dès à présent, car il s'agit d'une démarche complexe. Dès lors que l'on parle d'équivalents temps plein, les entreprises doivent réaliser une foule de calculs. Par ailleurs, et sous réserve de futures précisions, cela risque d'être encore plus compliqué pour les organisations qui comptent des implantations à l'international  », précise Muriel Besnard, consultante juridique chargée de la veille légale RH chez ADP, géant mondial des solutions de ressources humaines et de paie qui gère les fiches de paie de plus de 3 millions de salariés français. Elle ajoute que, « une fois le travail de mise en place effectué, rien ne devrait empêcher les entreprises d'industrialiser la démarche ».

 

« Rien de révolutionnaire »

L'article 187 précise enfin que l'évolution de ces ratios au cours des cinq derniers exercices devra être mentionnée dans le rapport sur le gouvernement d'entreprise. « Les sociétés ne se pliant pas à ces nouvelles obligations en termes de ratio d'équité risquent d'être pointées du doigt par l'Autorité des marchés financiers et le Haut Comité de gouvernement d'entreprise. Et la loi prévoit que toute personne intéressée peut demander au tribunal d'obliger le conseil d'administration à publier l'information en cas de manquement », indique Bruno Dondero. Selon lui, cet amendement constitue une réponse au débat sur la rémunération des « grands patrons » qui anime la société depuis une vingtaine d'années, « mais il n'y a pourtant rien de révolutionnaire dans la publication des ratios d'équité, puisque les entreprises cotées avaient déjà l'obligation de rendre publique la rémunération de leurs dirigeants ».

Muriel Besnard, elle, voit dans cette évolution législative une avancée pour que « les entreprises tendent à plus de transparence et d'éthique, mais il ne s'agit-là que d'un début : de là à dire que cela sera suffisant pour changer les mentalités, cela reste à voir ! »

 

Source : Julie Le Bolzer - Les Echos